vendredi 18 juin 2010

Spécial fêtes des pères

Dans un registre plus intime…

Ayant plus d’affinités avec les idées qu’avec les images, je suis peu friand de poésie. Néanmoins, jadis, pour l’un de mes moult diplômes, j’ai dû commettre quelques poèmes, dont le suivant. Il a été pondu lors d’un cours de création littéraire dont l’objectif était de s’inspirer profondément de l’œuvre d’autres auteurs, c’est-à-dire comprendre la mécanique du genre et interpréter le texte avec une approche plutôt thématique et mythocritique. Dans ce cas-ci, le poème à émuler était Devant deux portraits de ma mère d’Émile Nelligan. J’ai écrit le mien, au titre pompeux de Diptyque paternel, environ six mois après le décès de mon père. Je ne l’ai pas retouché depuis sa création il y a presque vingt ans. Sa forme classique, un sonnet en alexandrins, fait qu’il y aurait des coins à arrondir, particulièrement au cinquième vers. Mais je le publie quand même tel quel afin de se rappeler qu’il n’y a rien de plus barbare qu’une mort trop précoce.

Diptyque paternel

À genoux près de lui, les yeux clos, je le vois:
Son rire confiant, sa voix chaude et sévère,
Ses deux immenses mains où j’avais mon repère;
Comme il était noble ce portrait d’autrefois.

Ce visage éclairé, ce phare flamboyant,
Le temps y a creusé ses rides sépulcrales.
Sa bouche s’est figée après un dernier râle
Peignant le trait ultime à ce tableau géant.

Encadré de chêne, de cuivre et de satin,
Rendu à la brune d’une nuit sans matin,
La fresque dérive sur un fleuve de larmes.

Devant cette icône qui ne respire plus,
Ce masque de cire, cette copie sans charmes,
Je me sens triste, seul et, sans guide, perdu.

18 février 1992

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