jeudi 29 juillet 2010

Car son bras sait porter la croix – The Armageddon Factor

En décembre 1866, alors qu’ils étaient à Londres afin de négocier l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, John A. MacDonald et ses joyeux drilles cherchaient comment définir ce qui allait être l’une des plus grandes réalisations de l’humanité (selon Stéphane Dion): le Canada. Le premier ministre du Nouveau Brunswick, un charmant dévot, trouva la solution dans les Psaumes (72, verset 8): «He shall have dominion also from sea to sea and from the River to the ends of the earth». Ainsi, grâce à cette intervention divine, notre pays est un dominion et sa devise latine, A mari usque ad mare.

Aujourd’hui, à la veille de la fin du monde, différents organismes religieux canadiens, sous l’œil bienveillant de leurs contreparties américaines, contribuent à l’accomplissement du psaume – car, selon eux, notre dominion aura un rôle à jouer lors de la bataille d’Armageddon – et œuvrent à rechristianiser le Canada, avec l’objectif d’en faire une théocratie. C’est pourquoi ces nationalistes chrétiens, principalement par le biais du Parti conservateur, s’immiscent dans la sphère politique afin que les lois, les règlements et les programmes reflètent davantage leurs valeurs et que notre pays remplisse sa destinée.

Vigoureusement critiqué, surtout par les médias de droite, The Armageddon Factor (Toronto, Random House Canada, 2010), de la journaliste Marci McDonald, a néanmoins une grande qualité pour les lecteurs de l’autre solitude, c’est-à-dire jeter un éclairage sur la montée de la droite religieuse, des theocons, dans le ROC. L’impact de ces groupes et de ces églises, dont les nombreux et fréquents contacts avec les membres du gouvernement et les hauts fonctionnaires feraient saliver d’envie les journalistes qui couvrent la colline parlementaire, est bien visible: par exemple, le refus des conservateurs de financer le contrôle des naissances, les coupures de budget chez les organismes dont la mission s’éloigne des valeurs conservatrices, etc. De plus, avec des stars montantes telles que Stockwell Day (président du Conseil du Trésor), qui ne croit pas en évolution, et Jason Kenney (ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme), qui a enlevé le passage sur les droits des homosexuels dans le guide aux immigrants, il est clair que le Parti conservateur emprunte une tangente qui mène inévitablement vers un obscurantisme où la morale des uns s’impose et devient la loi de tous. Le Canada est sur la bonne voie pour connaître sa propre Grande Noirceur.

Petite lecture
Danic Parenteau et Ian Parenteau, Les idéologies politiques. Le clivage gauche-droite, Montréal, Presses de l’Université du Québec, 2008.

Nous nous posons tous la question: Richard Martineau est-il de droite ou de gauche? C’était une question piège: il sévit dans un univers parallèle dominé par la confusion, l’amalgame et l’hystérie. Mais nous, pauvres humains, de quel bord penchons-nous? Dans leur ouvrage, les frères Parenteau débroussaillent la notion d’idéologie politique et éclaircissent ses différentes variantes: le libéralisme au centre; le socialisme à gauche; le communisme et l’anarchisme à l’extrême gauche; le conservatisme et le libertarianisme à droite; le fascisme à l’extrême droite; et enfin le nationalisme et l’écologisme qui s’adaptent à toutes les teintes. L’ouvrage parfait pour expliquer à votre cousin teabagger que le président Obama ne peut pas être à la fois communiste et fasciste.