mardi 5 octobre 2010

32 questions brèves sur la religion

La semaine dernière, un sondage mené aux États-Unis par le Pew Forum on Religion and Public Life a montré que les croyants s’y connaissaient moins en religion que les athées. En moyenne, les sondés ont répondu correctement à 16 des 32 questions et les résultats se déclinent comme suit: les athées et les agnostiques ont eu 20,9, les Juifs, 20,5, les Mormons, 20,3, les Protestants, 16, et les Catholiques, 14,7. Les résultats ne doivent pas être très différents au Québec. Quant à moi, j’ai eu 27/32. J’ai des petites lacunes en Hindouisme et en Bouddhisme, et en histoire américaine. Les questions sont ici.

Pourquoi les athées ont-ils eu de meilleurs résultats que les croyants? Il semblerait que le niveau d’éducation des premiers ait été supérieur à celui des seconds, du moins dans l’échantillon. Ce qui ne veut pas dire que la connaissance rend athée! Ça signifie plutôt que l’éducation réduit l’ignorance.

Je suis athée et j’ai apostasié. L’expression «catholique non pratiquant» cachait trop d’hypocrisie à mon goût. Je ne crois pas en Dieu et n’ai pas besoin d’un préfet de discipline, qui verrait tout ce que nous faisons et qui nous ferait des reproches à la fin de nos jours, pour mener une vie bonne. De plus, il n’y a pas de preuve scientifique de l’existence de Dieu, car il se situe hors du champ de l’expérience. C’est pourquoi il y a la foi. Et le pari de Pascal, très peu pour moi: je ne suis pas gambler!

Néanmoins, la religion, que nous le veuillons ou non, fait partie de l’identité de chacun – il est impossible de comprendre l’individu sans connaître sa culture, donc ses récits mythiques, ses croyances et ses coutumes – et plusieurs ont besoin de croire pour être heureux. C’est pourquoi je suis partisan du cours Éthique et culture religieuse. Enfin, il y a des mauvais enseignants partout et la population n’a jamais remis en question les programmes de mathématiques ou de géographie. Pourquoi tant d’acharnement sur le cours ÉCR? Parce qu’il rend l’individu libre de suivre la voie qu’il souhaite, nonobstant les objections de fondamentalistes, religieux ou non, qui voudraient nous imposer leurs croyances.

Jésus philosophe?

Récemment, je me suis interrogé sur la distance entre le message original de Jésus et celui de l’Église. (Un remerciement spécial à Mgr Ouellet!) Il me semblait que plusieurs haut-parleurs de la doctrine officielle romaine trahissaient souvent l’enseignement du Christ qui, rappelons-nous, se résume dans une seule formule: «Aimez-vous les uns les autres».

Dans Le Christ philosophe (Paris, Seuil, 2009), Frédéric Lenoir revisite l’histoire du christianisme des origines à aujourd’hui et souligne la modernité du message du Christ qui prône l’égalité, la liberté individuelle, l’émancipation de la femme, la justice sociale et la séparation de l’Église et de l’État. Bref, des valeurs qui ont été occultées par Rome, qui a confondu les pouvoirs politiques et religieux, durant plus d’un millénaire. Ces valeurs ont refait surface à la Renaissance, en réaction aux abus du clergé. La modernité serait donc née en réaction contre l’Église en puisant sa source dans l’éthique de Jésus.

D’un côté plus spirituel, Jésus, selon Lenoir, favoriserait une pratique intérieure qui ne rendrait indispensable aucune médiation humaine, voire aucune institution, comme il le laisse entendre dans cette parabole du Jugement dernier:

Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, escorté de tous les anges, alors il prendra place sur son trône de gloire. Devant lui seront rassemblées toutes les nations, et il séparera les gens les uns des autres, tout comme le berger sépare les brebis des boucs. Il placera les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche. Alors le Roi dira à ceux de droite: “Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume qui vous a été préparé depuis la fondation du monde. Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger, j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais un étranger et vous m'avez accueilli, nu et vous m'avez vêtu, malade et vous m'avez visité, prisonnier et vous êtes venus me voir.” Alors les justes lui répondront: “Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé et de te nourrir, assoiffé et de te désaltérer, étranger et de t'accueillir, nu et de te vêtir, malade ou prisonnier et de venir te voir?” Et le Roi leur fera cette réponse: “En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait.”» (Matthieu 25:31-40)

En effet, l’essentiel est là! Et peu importe que je sois athée et apostat, je risque quand même d’aller au paradis!

Petites lectures
Charles P. Pierce, Idiot America. How Stupidity became a virtue in the land of the free, New York, Doubleday, 2009.
Markos Moulitsas, American Taliban. How War, Sex, Sin, and Power Bind Jihadists and the Radical Right, San Francisco, Polipoint Press, 2010.

Les Américains sont fascinants. D’une part, ils ont créé l’une des sociétés les plus avancées au monde. D’autre part, ils sont capables de tomber dans la bêtise la plus abyssale. Pierce, dans American Idiot, parle de la guerre à l’expertise qui sévit aux États-Unis, surtout pour des raisons économiques et politiques, et dont l’objectif est d’éliminer cette idée folle que la connaissance est bonne pour établir celle que nous ne devrions écouter que ceux qui en savent le moins. Car, n’oublions pas, les experts font partie de la diabolique élite! L’avis du pasteur d’une église obscure sur la théorie de l’évolution vaut amplement celle du docteur en biologie moléculaire! Pourquoi élire quelqu’un d’intelligent alors qu’on peu choisir celui avec qui on irait prendre une bière? Pourquoi le consensus de milliers de climatologues sur le réchauffement climatique aurait-il plus de poids que celui d’une dizaine de «scientifiques» qui confondent climat et météo et qui se consacrent à attaquer le messager plutôt qu’à trouver les failles dans la rigueur du message? Bref, trois principes animent cette Amérique des idiots:

  • toute théorie est valide si elle vend assez de livres ou dope les cotes d’écoute, bref si elle est rentable; 
  • est vraie toute chose qu’on a dite assez fort; 
  • et un fait est une chose qui est crue par suffisamment d’individus, la vérité étant déterminée par la ferveur des croyants. 
Si nous nous fions à ce que nous lisons ou écoutons au Québec, nous devons admettre que l’idiotie américaine est contagieuse.

Dans un même ordre d’idées, mais un registre plus baveux, Moulitsas trace des liens entre les valeurs de la droite américaine et celle des Talibans: le moralisme omniprésent, l’objectif d’établir d’une théocratie, le recours à la torture, le besoin de toujours déclarer la guerre à quelqu’un, la censure, la misogynie et la servitude de la femme, l’effritement des libertés, etc. C’est un peu charrié, mais franchement rigolo!

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